En direct de son voyage au Japon, notre « prospect » (ndlr : Sons of Anarchy), Mako nous fait parvenir son live-report du concert de kaimokujisho qu’il a vécu dans la scène underground de Tokyo au live house : Heaven’s Door.
3 octobre 2014. Sangenjaya.
Un jeune français déambule dans les rues, cherchant péniblement son chemin dans ce quartier de la grande Tokyo.
Finalement, c’est à l’embouchure d’une ruelle et grâce l’aide d’une jeune nippone que ce dernier atteint sa destination : le Live house Heaven’s Door.
« Ironique? » se demande le jeune homme alors qu’il descend les marches pou pénétrer dans la salle.
En effet, le lieu est à l’image de la scène underground qui survit aux quatre coins du pays : sombre, sale et petit, se cachant de la vie en surface, un peu honteux d’exister.
« On est loin d’atteindre le paradis » se dit le naïf alors qu’il commande une bière au bar dont la surface est recouvert de tags.
Mais d’aucuns diront que les apparences sont souvent trompeuses.
Très vite, l’étranger se plaît dans ce recoin obscur de la ville, se prenant à sourire alors qu’en face de lui déjà, un groupe dont le nom lui échappe, étale la fin de sa setlist à coups de guitares moyennes et lignes de chants hasardeuses.
« C’est un lieu qui leur va bien » se dit le jeune homme en s’imprégnant de l’atmosphère particulière qui règne en ces lieux, où à peine une vingtaine de personnes attendent silencieuses, le groupe qui lui aussi, l’intéresse fortement.
Ce soir, Kaimokujisho (カイモクジショウ) joue.
Après la sortie de deux disques prometteurs, ce jeune trio indé aux sonorités rock/garage/métal, reste aujourd’hui encore méconnu des fans du genre. Quoi de mieux que la sortie d’un premier album en novembre prochain et d’une tournée à l’occasion, pour montrer ce que le groupe a dans le ventre ? Et croyez-le ou non… c’est de la dynamite !
Après un quart d’heure d’attente, le temps d’installer le matos, le groupe monte finalement sur la petite scène. Les quelques présentations d’usage passées, les musiciens enfilent leurs instruments alors que la chanteuse s’échauffe à sa manière, se mouvant comme un balancier au fond du ring. Les lumières s’éteignent, la salle fait silence.
Voici l’explosion.
Dès les premières secondes du live, l’étranger comprend soudain pourquoi il a tant voulu venir.
Le trio est incisif violent, carnivore. Chacun fait son job à merveille, faisant presque oublier la notion d’espace et de temps à l’assistance qui enfin, se réveille dans la salle (il faut dire que les formations précédents n’avaient pas vraiment aidé).
Pour leur courte setlist (cinq morceaux), les musiciens commencent par une piste inédite issue du prochain album « Jidou », et jouent quelques titres du premier EP « Conception » et du dernier mini, notamment le mastodonte « 海の果て » dont la force repose sur un riff de guitare d’étonnant, mélange de rythmique punk et groovy. C’est d’ailleurs cette guitare qui retiendra d’abord l’intention du petit français présent aux Portes du Paradis. Oui car le son de Yuuki Takahashi est alléchant, sale, tranchant, rappelant non sans nostalgie celui des groupes indés qui faisaient tournoyer la jeunesse dans les 90’s. Pas besoin de bassiste, il est un groupe à lui tout seul, faisant le bouleau de trois gratteux avec son rack de 20 pédales.
Le batteur (Tetsuya Ueda) quant à lui n’a rien à lui envier. Tout au long du court show, il martèlera ses toms avec une férocité sans nom, accompagnant justement les lignes de guitares et le chant aliénant de Natsumi Nishida. Cette dernière d’ailleurs, sous-couvert d’un son et lumières plutôt bien gérés, démontrera bien qu’être une femme dans un univers d’homme n’est pas une tare. Sa voix résonne, parle, touche. Ses cris percutent, dérangent et font vibrer les tympans alors que en long et en large de la scène, son corps parait se mouvoir seul, tel un humain dépossédé de lui-même et incapable de contrôler ses membres.
Ce personnage pour le moins intriguant n’est pas sans rappeler celui d’un certain film d’horreur asiatique bien connu.
Les morceaux s’enchaînent et la chaleur monte, mais déjà la chanteuse annonce que c’est la fin. Coup de poignard douloureux alors qu’en prononçant ses derniers remerciements, les premières notes de la masterpiece du précédent mini-album: « The root of international voices » résonne. Un titre dont la richesse et la cohérence musicale à de quoi faire pâlir d’envie plus d’un érudit de grunge, de métal et de musique punk.
La chanson se termine après plus de 6 minutes de folie, et le trio s’éclipse discrètement, aussi humble qu’à son arrivée.
Que faut-il retenir de ce concert ? Son contenu explosif.
Après deux disques studios prometteurs, ce soir le groupe aura prouvé qu’en live aussi il sait faire de la musique.
Kaimokujisho en a revendre. Son univers, sa force, sa sincérité sont indéniables. Le seul regret de la soirée réside en la durée de la set-list. Quel sublime feu d’artifice… mais trop court !
Espérons que dans un avenir proche, le groupe aura l’occasion de faire vivre sa musique en public, et ce, plus longtemps.
Pas d’inquiétude amis, novembre semble être bien parti. Et c’est tant mieux, car ces types ont du talent !
Mako.